Serge Arbiol - Guitare

Musique sacrée

Si cette suite commence par trois œuvres extraites du répertoire liturgique arménien, c’est avant tout parce que le tragique destin de ce peuple — au sein duquel j’ai vécu deux ans — m’a profondément touché. Komitas (1869-1935), compositeur de Patarag (la Messe) a perdu l’esprit après le génocide de 1915. J’avais depuis longtemps envie de transcrire pour guitare quelques airs de cet honnête homme. Je tenais également à évoquer Makar Ekmalian dont les ouvres liturgiques, plus récentes, sont très populaires en Arménie, et, à travers lui, mon ami Edouard Badalian, guitariste d’Erévan dont j’ai repris en la transposant, cette transcription d’un Andante qu’il m’avait offert en 1980.

Il y a longtemps que je souhaitais enrichir mon répertoire de musique sacrée pour guitare, mais jusqu’à présent je n’avais ni l’instrument ni les partitions nécessaires à la réalisation de ce rêve.

Et voici que, coup sur coup, je fais trois rencontres déterminantes : Celle d’Hervé Lahoun, jeune luthier toulousain, auquel j’apporte un instrument à régler et qui me montre une de ses guitares. Je l’ai prise dans mes bras, mes doigts ont caressé ses cordes et elle m’a offert des sons d’une beauté bouleversante. En rentrant chez moi, j’ai parlé de cette rencontre à Cécile puis je suis allé me coucher, terrassé. Le lendemain je retournais chez Hervé. Je n’avais pas d’argent pour l’acquérir, mais je ne pouvais plus vivre sans cette guitare…

La seconde rencontre, c’est celle d’un jeune homme qui s’appelle Philippe Murillo. Quand je pense à lui, la première chose qui me vient à l’esprit, c’est un grand sourire sur un visage rayonnant. Philippe épouse Gaëlle en août 2001. J’ai voulu leur faire un cadeau. Comme Philippe est organiste, c’est tout naturellement que ces musiques sont nées de mes « butineries » sur Internet où j’ai trouvé des trésors qu’il ne restait plus qu’à soumettre à mon instrument afin qu’il me les rende transcendées par sa profondeur mélancolique. Et c’est là que survient la troisième rencontre, celle d’une femme extraordinaire du XIIème siècle, Hildegarde de Bingen (1098-1179) à qui nous devons entre autres, plus de 70 œuvres vocales d'une grande beauté qui ont à la fois perpétué et renouvelé le chant grégorien.